Créatifs culturels et transformation sociale

Jean-Christophe Giuliani

Après la seconde guerre mondiale, le partage équitable de la valeur ajoutée et des gains de productivité provoqués par le Front populaire et la mise en œuvre du programme du CNR ont provoqué une mutation sociale profonde. En se combinant entre eux, la journée de 8 heures, les 2 jours de repos hebdomadaire, les congés payés, le développement économique, le progrès technique, l’amélioration du niveau de confort matériel, la protection sociale et l’élévation du niveau d’éducation ont favorisé l’émergence d’un nouveau groupe culturel : les créatifs culturels.

  • L’émergence de la contre culture des années 60

À la fin des années 60, la génération issue du baby-boom avait entre 18 et 23 ans. Non seulement elle n’avait pas connu la guerre, la faim, le monde du travail et le chômage, mais en plus elle avait vécu les conséquences positives et négatives de l’ascension sociale de leurs parents. Puisqu’ils avaient connu le temps libre pour-soi, expérimenté de nouvelles formes de socialisation et d’expressions plus épanouissantes et élargies leur perception de la vie, les jeunes diplômés issus de l’université et des grandes écoles devenaient plus exigeants vis-à-vis de l’intérêt et du sens de leur travail. Ayant expérimenté de nouvelles pratiques de vie, ils avaient changé leur conception de la vie et découverts qu’il était possible de se socialiser, de nourrir l’estime de soi et de se réaliser autrement que par l’activité professionnelle et la consommation. En prenant conscience que la consommation ostentatoire était une compensation d’une vie gâchée à travailler, l’entrée dans la vie active n’apparaissait pas comme une perspective réjouissante. Ayant connu l’autonomie et la liberté, les jeunes étudiants issus de la classe ouvrière et de la classe moyenne n’étaient pas prêts à accepter l’état de servitude volontaire de leurs parents.

En 1990, André Gorz décrivait une révolution culturelle liée à la valeur du travail. Cette révolution, qui était d’actualité durant les années 60, l’est toujours en 2020 .

Cet état d’esprit vis-à-vis du travail ne concernait pas que les jeunes et les étudiants. En 1968, une part croissante d’ouvriers qualifiés, de techniciens, d’ingénieurs et de cadres avaient sécurisé leurs besoins essentiels, assuré leur confort matériel et stabilisé leur situation sociale. Le chômage étant quasiment inexistant, ils n’avaient pas peur de perdre leur emploi. Ayant une stabilité professionnelle et la possibilité de construire leurs carrières au sein de la même entreprise, ils pouvaient se projeter dans l’avenir et donner un sens personnel à leurs vies. Malgré ces conditions « idylliques », les travaux de recherche de Jean Rousselet faisaient apparaître qu’ils vivaient une révolution silencieuse du temps qui affectait profondément leurs relations au travail.

« Les jeunes ne sont pas seuls à témoigner d’une telle désaffection pour l’activité de travail. Beaucoup d’adultes, de travailleurs déjà insérés dans la vie active ressentent ou affichent le même mépris des tâches et des responsabilités qui sont exigées d’eux. Chez certains, cet état d’esprit ne fait que prolonger un état d’esprit développé pendant la jeunesse. L’expérience vient le renforcer en permettant de vérifier sur le terrain le pessimisme des jugements préalables et surtout en dévalorisant tout ce qui avait pu contribuer à embellir la perspective de la future existence professionnelle d’attraits étrangers à son aspect purement travail. »[1]

« Il n’est pas sans intérêt d’apprendre ainsi que si pour 98 % des jeunes l’activité laborieuse a aujourd’hui complètement perdu son sens de devoir ou d’obligation morale, il en va de même pour 95 % des adultes. Pour cette écrasante majorité, elle n’est plus et dans un ordre décroissant, qu’un moyen de gagner sa vie, un échange de temps contre de l’argent, une contrainte sociale et pour quelques-uns même le seul moyen de lutter contre l’ennui. Et cela même dans des milieux encore imprégnés d’éthique chrétienne ou de philosophie socialiste, puisque 30 % des populations interrogées font état de pratiques religieuses régulières et que 40 % d’entre elles affirment leur obédience marxiste. »[2]

À mesure que leur pouvoir d’achat s’élevait, plus de 90 % des salariés adoptaient une posture critique vis-à-vis du travail et de la consommation. Auparavant considérée comme un devoir moral et le pôle de référence de la construction identitaire, l’activité professionnelle était désormais perçue comme une contrainte et un simple moyen de gagner sa vie. Mais surtout, les salariés prenaient conscience que pour gagner plus ou plutôt, perdre leurs vies à consommer, ils étaient contraints d’échanger du temps contre de l’argent. Les besoins physiologiques, de sécurité, d’appartenance et d’estime étant satisfait, le besoin de réalisation émergea[3].

Ayant une expérience significative, les salariés constataient que l’activité professionnelle n’avait pas la vocation de répondre à leurs aspirations. Ce comportement a été conceptualisé sous le « modèle dynamique Buddenbrook »[4]. Dans « Les Buddenbrooks », Thomas Mann met en scène trois générations : la première recherche l’argent, la seconde, née riche, recherche le prestige social et civique, et la troisième, dotée dès la naissance du bien-être et du prestige, se tourne vers la musique. En attachant peu d’intérêt à ce qu’elle tient pour acquis et en recherchant de nouvelles formes de réalisation, la génération issue du baby-boom remettait en question la consommation et la valeur du travail. En élargissant sa perception de la vie, elle a favorisé l’émergence de nouvelles normes, valeurs et aspirations à l’origine de la contre-culture du mouvement hippie.

Comme le disait Bob Dylan en 1964, The times they are changin (Les temps changent)

Ils étaient nombreux à aspirer à plus de temps libre pour choisir leur vie et leur mode de vie. S’exprimant sous la forme de tensions de plus en plus aiguës, cette mutation apparaît comme un moment de fragilité dans la trajectoire de l’individu. Le roman et le film « l’arrangement »[5] d’Elia Kazan décrivent cette quête de soi et de sens, qui apparaît comme un moment de rupture, de fragilité et de crise existentielle profonde. Puisque ces mutations individuelles et sociales n’étaient pas reconnues et acceptées par l’élite économique, la société est entrée dans une crise du rapport au temps. « La société était en crise, elle était malade du temps ».

En mai 1968, que ce soit en France, en Italie, au Japon, aux États-Unis, etc…, les pays industrialisés étaient confrontés à des grèves et des révoltes. Les gouvernements et le patronat devaient faire face à deux formes de revendications, que Luc Boltanski a décrites dans « Le nouvel esprit du capitalisme »[6] : la « critique sociale » et la « critique artiste ». La critique sociale était portée par les ouvriers, les syndicats et le parti communiste. Leurs revendications concernaient le partage de la valeur ajoutée, ce qui se traduisait dans les faits par une augmentation des salaires et une amélioration des conditions de travail.

La critique artiste était portée par les étudiants, les jeunes diplômés et les hippies, ainsi que par les techniciens, les cadres et les ingénieurs. Les tenants de la critique artiste dénonçaient l’oppression du système capitaliste, le désenchantement du monde, la perte de sens du monde bourgeois, ainsi que la déshumanisation et l’aliénation du monde du travail. La contre-culture du mouvement hippie dénonçait l’inauthenticité de l’existence, la nécessité d’avoir un emploi pour s’insérer socialement, la misère de la vie quotidienne « métro, boulot, dodo », l’organisation patriarcale de la société, l’oppression des femmes, le paternalisme, la prédominance du mode « avoir » sur le mode « être », etc… Ceux qui avaient une expérience professionnelle dénonçaient les tâches prescrites et répétitives, la séparation de la conception et de l’exécution, les horaires imposés et l’absence de créativité et d’autonomie dans les entreprises. Ils rejetaient également la subordination hiérarchique et l’autoritarisme des entreprises. Ce n’est donc pas un hasard, si l’un des slogans de mai 1968 était : « Ne perdez pas votre vie à la gagner. »

  • L’émergence des créatifs culturels

La crise, dont les prémisses remontent à 1973, n’a pas empêché les changements de mode de vie et les transformations sociales liées à la quatrième phase de la dynamique des temps sociaux. Malgré la crise, les transformations liées, d’une part, à la journée de 8 heures, aux 2 journées de repos hebdomadaire et aux congés payés, et, d’autre part, à l’apparition des blocs de temps sociaux de la vie active, de la société de consommation, de la retraite et de l’éducation n’ont pas cessé de s’amplifier. Le développement économique, le progrès technique, l’évolution du niveau de confort matériel, ainsi que l’accès au temps libre et aux loisirs ont favorisé l’émergence de nouvelles valeurs et aspirations. Même si les causes de cette mutation ne sont pas exhaustives, j’ai identifié six facteurs qui, combinés entre eux, permettraient de l’expliquer : l’émergence des « créatifs culturels », le « brown-out », le manque de temps libre, les pratiques associatives et amateurs, les chômeurs heureux, Internet et les réseaux sociaux.

Malgré la crise, les aspirations des tenants de la critique artiste et de la contre-culture du mouvement hippie n’ont pas disparu. Avec leurs descendants, ils ont favorisé l’émergence d’un nouveau groupe culturel : les « créatifs culturels »[7], qui a été identifié et étudié au milieu des années 90 par les sociologues Paul Ray et Sherry Ruth Anderson[8]. Ils les ont nommés les créateurs de cultures, car ils créent et expérimentent de nouvelles pratiques économiques et sociales, s’interrogent sur les valeurs, réinventent leurs modes de vie et changent leur vision de l’existence. Ces sociologues ont montré l’existence de trois groupes culturels : les traditionalistes, les modernistes et les créatifs culturels.

Les traditionalistes accordent de l’importance à la famille, ainsi qu’à l’appartenance à une communauté religieuse, nationale et professionnelle. La famille étant de type patriarcal, les hommes et les femmes sont déterminés par des rôles sociaux distincts. Tandis que l’homme travaille pour assurer les subsistances de la famille, la femme s’occupe du foyer et des enfants. Puisqu’une vie bonne repose sur le respect des principes religieux, au nom des traditions et de la morale, ils s’opposent à la liberté sexuelle et à l’avortement. Étant attachés à leur communauté d’appartenance, ils se méfient des étrangers et sont fermés aux autres cultures.

Malgré le fait qu’ils se considèrent comme modernes, les modernistes incarnent les valeurs de la bourgeoisie libérale du 19e siècle. Exclusivement préoccupé par le mode « avoir », le sens de la vie des modernistes consiste à gravir l’échelle sociale et à accumuler toujours plus d’argent et de biens matériels. Ils aiment se distinguer en exhibant des vêtements, une montre et une voiture de marque (Ralph Lauren, Rolex, Audi, etc…) et les dernières innovations technologiques (iPhone, iPad, etc…). Préoccupés par la réussite professionnelle, pour être plus performants et compétitifs, ils n’hésitent pas à faire appel à des « Coachs ». La valeur du travail, la consommation ostentatoire et le libre marché n’étant plus en phase avec les attentes de la population, l’hégémonie culturelle des modernistes est désormais en déclin dans les pays industrialisés.

Les créatifs culturels sont les descendants des tenants de la critique artiste et de la contre-culture des années 60. Ayant un niveau de qualification et un pouvoir d’achat élevés, ils font souvent partie de la classe moyenne et supérieure. Étant instruits, cultivés, curieux et ouverts d’esprit, ils sont ouverts aux autres, à la diversité culturelle, à la différence et aux changements. Ayant le souci de se réaliser, ils pratiquent le développement personnel pour mieux se connaître, se libérer de leurs freins intérieurs et actualiser leurs potentiels. Cette pratique leur permet d’être plus évolués que les traditionalistes et les modernistes sur les plans intellectuel, psychologique, relationnel et affectif. Leur philosophie de vie est : « se changer soi-même pour changer le monde ». Pour se réaliser, ils ont besoin d’autonomie, d’exprimer leur créativité, de pratiquer une activité en accord avec leurs aspirations et de donner un sens à leur vie.

À l’inverse des modernistes, ils sont davantage attirés par « l’être » que par « l’avoir ». Ce n’est donc pas la réussite financière, professionnelle et matérielle qui les motive à agir, mais la volonté de se réaliser. Les métiers d’avocat d’affaires ou de trader, qui font fantasmer les modernistes, ne font donc pas rêver les créatifs culturels. L’authenticité et l’intégrité personnelle étant des valeurs importantes, le créatif culturel souhaite aligner ses comportements sur ses convictions et s’engager pour une cause ou un projet qui a du sens. C’est-à-dire un projet qui est en accord avec sa vocation profonde. Comme l’affirmait Marc Halévy, « celui qui n’accomplit pas sa vocation, n’a aucune justification à son existence »[9].

Étant pour la paix, la défense de l’environnement, la solidarité, les valeurs féminines, la justice sociale et le développement des pays du Sud, le créatif culturel s’engage dans des associations, des ONG ou des partis politiques pour défendre les minorités ethniques, le droit des femmes et des homosexuels, les libertés civiques et l’écologie. Ouvert aux pratiques alternatives, il expérimente la médecine douce, la méditation, le jeûne et une forme de spiritualité qui permettent de se relier à la nature, à soi et aux autres.

Se sentant responsables des générations présentes et à venir, les créatifs culturels se soucient des enjeux environnementaux et climatiques. Ils adhèrent donc aux constats, ainsi qu’aux expérimentations menées dans les domaines agricoles, énergétiques, économiques, éducatifs et démocratiques, présentés par le documentaire « Demain »[10]. Afin de préserver l’avenir de l’humanité, ils se rallient aux principes de la « Décroissance », s’abonnent à des AMAP et pratiquent la simplicité volontaire.

Tandis qu’au milieu des années 90, ils représentaient 25 % de la population américaine, une étude menée en 2008 montrait qu’ils en représentaient 34,9 %[11]. En 2011, 17% des Français étaient des créatifs culturels. L’émergence des créatifs culturels n’apparaît donc pas comme un phénomène marginal, mais comme la genèse d’une transformation lente et profonde de la société. Étant à l’avant-garde du changement, ils contribuent à faire évoluer les valeurs, les pratiques, les modes de vie, la culture et la société.

Ayant un niveau de qualification élevé, les créatifs culturels appartiennent souvent à la catégorie socio-professionnelle des cadres. Tant que les cadres appartenaient aux groupes culturels des traditionalistes ou des modernistes, gravir les échelons hiérarchiques et gagner de l’argent pouvait procurer une raison de vivre. Puisque les créatifs culturels ne sont pas motivés par « l’avoir », la réussite sur le plan professionnel et matériel ne va plus de soi, si elle nuit à la planète. En remettant en question la valeur du travail et la consommation ostentatoire, ils menacent la pérennité du modèle économique dominant. Étant donné qu’ils disposent d’un pouvoir d’achat élevé et qu’ils sont qualifiés, créatifs et innovants, comme pour les tenants de la critique artiste, le management et le marketing cherchent une fois de plus à les récupérer. En effet, si les créatifs culturels refusaient de servir le système, l’ordre économique risquerait de s’effondrer.

  • Le brown-out, une épidémie qui touche les cadres

Après le « burn-out », qui correspond à un épuisement professionnel lié à une surcharge de travail, le « bore-out », qui est un épuisement lié à l’ennui sur le lieu de travail, le « brown-out » apparaît comme le nouveau mal du siècle[12]. Le brown-out, qui concerne principalement les cadres, est une sorte de baisse de tension liée à l’absurdité, à l’inutilité et l’absence de sens du monde du travail. Selon les chiffres de l’Ipsos, quels que soient les niveaux hiérarchiques, 54 % des salariés français seraient démotivés ou désengagés dans leur travail. Une étude de 2013, menée auprès de 1 000 cadres dirigeants américains (PDG, cadres de l’industrie et avocats d’affaires), montre que 40 % souffrent de brown-out[13]. Les symptômes du brown-out sont l’absence de motivation, la lassitude, le désengagement et une forme de fatigue spirituelle qui peuvent conduire à un dégoût de soi, à un repli sur soi, à des troubles physiologiques et psychologiques, à une dépression, voire même au suicide.

Le brown-out concerne tous les secteurs d’activités, tous les métiers et toutes les catégories socioprofessionnelles. Il concerne particulièrement les « bullshit Jobs »[14], c’est-à-dire des emplois bien rémunérés et gratifiants dont l’activité est chronophage, inutile, voire nuisible pour la société et l’environnement : les ressources humaines, le management, la communication, la publicité, le marketing, la finance, l’assurance et la banque. Plus un cadre est sain d’esprit et porteur de valeurs écologistes et humanistes, plus il a de difficulté à accepter d’effectuer le « sale boulot » ou un travail que la morale réprouve, plus il risque d’être victime du brown-out.

De plus en plus de cadres dirigeants constatent, déplorent et dénoncent le fait que la seule finalité des efforts qu’ils déploient pour atteindre leurs objectifs est d’augmenter les dividendes versés aux actionnaires. À force de collaborer à des actes ou à des missions qui s’opposent à ses valeurs : réduire les budgets et les effectifs, mettre la pression sur ses subordonnés, instaurer un climat de terreur, contribuer à des campagnes de communication mensongères, nuire à la société, contribuer au réchauffement du climat, etc…, non seulement le cadre finit par ne plus comprendre le sens de son engagement, mais en plus, il perd son amour-propre et n’est plus capable de se regarder en face. Même s’il est possible d’acheter le temps ou la présence physique d’un cadre, il n’est pas possible d’acheter sa loyauté, son dévouement et son engagement.

Les rémunérations élevées, les primes, les stocks options et les avantages sociaux ne suffisent donc plus à compenser la perte de sens et de valeur du travail. Face à l’absurdité de leur activité, de nombreux cadres du marketing, de la communication, de la finance, de la publicité, de la banque, etc…, abandonnent leurs carrières bien rémunérées pour se reconvertir dans la restauration, l’ébénisterie, la boulangerie[15], la pâtisserie, la mécanique[16], l’ouverture d’un bar, etc… En pratiquant ces activités, le cadre tente de contribuer à quelque chose d’utile, de retrouver le contrôle de son existence et de donner un autre sens à sa vie.

  • La pratique d’autres activités de socialisation et d’expression malgré le manque de temps libre

Malgré le fait qu’ils manquent de temps libre, les cadres et les classes moyennes pratiquent déjà d’autres activités de socialisation et d’expression. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Une étude de 2012 montrait que, 23 millions de Français, soit 45 % des plus de 18 ans, adhèrent à une association et 16 millions de personnes, soit 32 % de la population, pratiquent une activité bénévole ou amateur (artistique, sportive, intellectuelle, manuelle, etc…)[17]. Non seulement ils participent à la vie associative, mais en plus ils s’impliquent dans la vie politique et des conseils de quartier. En pratiquant ces activités, le cadre se socialise, se distingue, s’affirme, nourrit l’estime qu’il a de lui, se réalise et redonne un sens à sa vie autrement que par l’activité professionnelle et la consommation.

Plus il consacre de temps à ces activités, plus il éprouve le désir d’en augmenter la fréquence et la durée, plus il est confronté à une réalité concrète : le manque de temps libre. En décembre 2006, les lecteurs du mensuel « Psychologie Magazine », dont la plupart sont des cadres, des membres de la classe moyenne et des créatifs culturels, étaient invités à réfléchir sur ce qui est important dans la vie.

« Parce que nos ressources intérieures ne sont pas infinies, parce que celles de la planète ne sont pas éternelles, il nous faut apprendre à faire des pauses. Arrêter d’agir, de consommer, de chercher à remplir nos vi(d)es pour s’interroger : « au fond, qu’est-ce qui et vraiment important pour moi aujourd’hui ? » »[18]

Cet article montre que même si elle assure un revenu élevé et un statut social attractif, la réussite professionnelle ne procure plus de bien-être et n’est plus capable de répondre aux aspirations des cadres. En réponse à la question : « Dans votre vie, qu’est-ce qui vous manque le plus ? », 25 % des 2 100 internautes sondés déclaraient manquer de temps. Ce sondage fait également apparaître que 29 % des sondés aspirent à plus de dialogues, 23 % à plus de loisirs, 13 % à plus d’espaces et 10 % à plus de réflexions. Qu’ils en soient conscients ou non, le lien qui unit ces aspirations est le temps. En effet, il faut disposer de temps libre pour installer un dialogue de qualité, pratiquer des activités personnelles et approfondir sa réflexion. Sans le dire ouvertement, cet article fait apparaître que la principale préoccupation d’une part croissante des cadres et des classes moyennes est de disposer de temps libre. Selon un sondage paru en 2015, 93 % des sondés estimaient que l’équilibre des temps de vie professionnelle, familiale et associative est une préoccupation « très importante ». L’équilibre n’étant pas atteint, 71 % des salariés affirment manquer de temps et de courir après pour profiter de leurs proches ou de leurs loisirs[19]. En 2014, 35 % des cadres avaient des difficultés à concilier une vie professionnelle et une vie privée[20]. En s’épuisant à courir après le temps, en travaillant plus pour gagner plus, en consacrant moins de temps au sommeil et en sacrifiant sa vie de famille ou sa vocation pour la préserver, le cadre se rend malade à cause du manque de temps.

Malgré le fait que l’équilibre des temps de vie a un impact positif sur la performance des salariés, des cadres, des dirigeants d’entreprises et des entreprises, la norme de la semaine de travail est toujours de 5 jours. Ayant besoin de temps libre pour se socialiser, nourrir l’estime de soi et se réaliser autrement que par l’activité professionnelle, les employés, les cadres, les chefs d’entreprises, les entrepreneurs, les professions libérales, les agriculteurs, les artisans et les commerçants sont donc de plus en plus nombreux à souhaiter réduire et aménager leur temps de travail.

  • L’émergence des chômeurs heureux

Face au déclin de la valeur du travail, à l’épidémie de brown-out et aux aspirations liées au temps libre, la peur du chômage apparaît comme l’ultime rempart. Pour qu’elle soit efficace, être exclu du monde du travail doit apparaître comme un épouvantail. L’activité professionnelle étant considérée comme la principale activité de socialisation, le chômeur doit se sentir en situation d’exclusion sociale. N’ayant pas d’emploi pour dicter sa conduite, le définir et donner un sens à sa vie, un individu dépossédé de son travail s’ennuie et se sent inutile. Ayant le sentiment d’être sans qualité, ainsi qu’un fainéant et un assisté qui vit aux crochets de la société, le chômeur éprouve de la honte et de la culpabilité. Plus il culpabilise, plus l’image qu’il a de lui est négative, plus il se dévalorise et se replie sur lui-même, plus il vit la condition de chômeur comme une souffrance. Avoir un emploi apparaît donc comme une chance, un privilège. Puisqu’il vaut mieux avoir un emploi que d’être au chômage, pour fuir la honte, la culpabilité, la solitude, l’ennui et la souffrance, le chômeur est fortement motivé à en retrouver un. Il acceptera donc un emploi précaire et peu qualifié dont la rémunération est inférieure aux allocations auxquelles il aurait droit.

Le chômage et la peur du chômage étant des instruments de contrôle, de soumission et de maintien de l’ordre économique, l’émergence de « chômeurs heureux » apparaît comme un véritable cauchemar pour les élites économiques et politiques. Les médias cachent à l’opinion publique qu’une part croissante de salariés qui ont perdu leur emploi considèrent désormais qu’ils ont mieux à faire que de perdre leur vie à la gagner. Mais surtout, que des chômeurs expérimentent d’autres formes de socialisation, d’expression et d’existence plus bénéfiques et épanouissantes sur le plan individuel et collectif. Des témoignages de chômeurs heureux apparaissent dans le « Manifeste des chômeurs heureux »[21], le documentaire « Attention danger travail »[22] de Pierre Carles et le livre « Éloge de la démotivation » de Guillaume Paolli[23].

Au lieu de rechercher un emploi, ces chômeurs ont décidé d’arrêter de perdre leur temps et, donc, leur vie à la gagner. Ayant pris acte que le progrès technique et l’organisation du travail permettent de produire davantage en réduisant les effectifs, qu’une croissance infinie dans un monde aux ressources finis est une aberration, que l’activité professionnelle et la consommation ne contribuent pas au bonheur, que d’être adapté à une société malade n’est pas le signe d’une bonne santé psychique, etc…, de plus en plus de jeunes diplômés, de cadres et de membres de la classe moyenne désertent la guerre économique. Au lieu de déplorer la hausse du chômage, ces franges actives, éduquées et qualifiées de la population utilisent les allocations chômages auxquelles ils ont cotisé pour se réinventer en dehors du travail. En ne perdant plus leurs vies à la gagner, ces déserteurs accèdent au temps libre et, donc, à la liberté. En s’appropriant le temps, ils explorent, créent et expérimentent de nouveaux modes de vie qui donnent un sens à la vie.

C’est donc à la marge ou à la périphérie du salariat que s’expérimentent de nouvelles formes d’identité sociale, de nouveaux modes de vie plus épanouissants et les transformations sociales de demain. Tous les territoires ayant été conquis, le temps libre apparaît comme un nouvel Eldorado à conquérir. Au lieu de partir à la conquête du monde extérieur, celui qui ne perd plus sa vie à la gagner se consacre à explorer, à découvrir et à conquérir toutes les richesses et potentialités que peuvent lui procurer le temps libre. En consacrant du temps à ses enfants et à sa famille, à la vie associative et militante, à la politique, à la recherche en sciences humaines, à la création d’une œuvre, à jouer, à flâner, à faire la sieste et du sport, à lire et à écrire une œuvre littéraire, à donner des conférences, à animer des stages et des débats, etc…, il réinvente les liens qu’il tisse avec lui-même et les autres, se socialise, nourrit l’estime qu’il a de lui, s’affirme, se distingue et s’accomplit autrement que par l’activité professionnelle et la consommation.

En pratiquant ces activités, le déserteur du monde du travail finit par s’accepter et se reconnaître pour ce qu’il est réellement. En montrant que ce n’est pas le chômage, mais le regard que la société porte sur lui qui produit l’exclusion, le chômeur heureux le fait apparaître comme une source d’épanouissement. À travers son expérience de vie concrète, il invite à questionner la valeur du travail, ainsi que les représentations sociales et le sens de la vie que propose la société. En ne faisant plus apparaître le chômage comme un épouvantail et en remettant en question la nécessité d’exercer une activité professionnelle pour se socialiser et nourrir l’estime de soi, ils et risquent de donner de mauvaises idées aux salariés en poste. Si les salariés n’avaient plus peur du chômage, les élites économiques et politiques perdraient leur principal instrument de contrôle social. Pour éviter que le chômeur expérimente d’autres formes de socialisation plus épanouissantes, il est indispensable qu’il consacre tout son temps à la recherche d’un emploi. L’argent dépensé pour l’aider à en retrouver un apparaît donc comme un instrument de contrôle social.

  • L’émergence d’internet et des réseaux sociaux

Au même titre que l’imprimerie, l’apparition de l’informatique et d’Internet a provoqué une rupture culturelle qui transforme la société en profondeur. Non seulement, cette lame de fond se déploie rapidement, mais en plus, elle est mondiale. En vingt ans, Internet a révolutionné les modes de communication, ainsi que les modes d’accès à l’information et à la connaissance. En quelques clics, Internet permet d’accéder à des données qu’il aurait fallu de nombreuses heures, des jours, voire des mois à collecter. En réduisant les coûts et le temps d’accès à l’information, ce processus accélère la diffusion des idées. Avant l’apparition d’Internet, la connaissance et l’information, qui forment la volonté générale, étaient produites et contrôlées par les élites économiques, politiques, médiatiques, culturelles et universitaires. Les journaux, la radio, la télévision, le cinéma et le système éducatif permettaient aux élites de diffuser et d’imposer leurs valeurs à l’ensemble de la société pour mieux la contrôler et la manipuler. L’objectif de cette propagande est de fabriquer l’adhésion et le consentement[24] des cadres et des classes moyennes à la société de consommation et à l’ordre économique.

Les sites Internets (Wikipédia, les classiques des sciences sociales[25], etc…) et les réseaux sociaux (YouTube, Twitter, Facebook, etc…) procurent de nouvelles manières de travailler, de se relier, de communiquer et de partager de l’information et de la connaissance. Sans s’en rendre compte, sans le rechercher et sans avoir de volonté politique, ils court-circuitent les médias et les vecteurs de transmission de l’information officielle. À cause de ce court-circuit, l’information n’est plus transmise du haut vers le bas, mais de manière horizontale. La multiplication des réseaux permet la diffusion d’une pensée critique favorable à l’émergence d’une contre-culture, dont les idées et les valeurs alternatives, plus ou moins radicales, demeuraient jusqu’alors invisibles aux yeux du public. Les idées qui proviennent de la marge se répandent sur la toile pour devenir progressivement majoritaires.

À cause de ces nouvelles sources d’informations, plus de 50 % des Français ne font plus confiance aux médias traditionnels[26]. Ces échanges d’informations ont permis aux Français de rejeter la constitution européenne lors du referendum de 2005, de refuser de se faire vacciner lors de la campagne de vaccination contre la grippe H1N1 en 2009, etc… Ces nouvelles pratiques citoyennes contribuent à penser, à agir différemment et donc, à réinventer la société. La multiplication des sources d’information rend difficile la recherche d’idées, de valeurs et d’une vérité majoritairement acceptée par tous. L’absence de consensus rend difficile la construction d’un ordre social homogène qui reposerait sur une élite reconnue par tous. Face à la multiplication des réseaux sociaux, la soi-disant élite économique et politique est désemparée[27]. N’ayant plus le monopole de la production et de la diffusion de l’information, elle perd progressivement la légitimité de son autorité.

Sur le plan économique, Internet favorise l’expérimentation et l’adoption de nouvelles formes de partages, d’échanges et de financements plus collaboratifs. Les internautes achètent et vendent sur Leboncoin.fr, pratiquent le covoiturage avec BlaBlaCar.fr, écoutent de la musique sur Myspace.com, louent une voiture avec Ouicar.fr, se logent sur Airbnb.com, échangent du temps avec Rijsel.org, financent des projets participatifs en se passant des banques avec crowdfunding, etc… Ces pratiques collaboratives court-circuitent les acteurs économiques traditionnels. Puisqu’ils peuvent échanger entre eux du temps, des données, des biens et des services sans passer par un intermédiaire, les entreprises doivent donc s’adapter ou disparaître.

  • La crise du rapport au temps d’une société en mutation

En sécurisant l’accès aux subsistances et en créant un système éducatif, de retraite et de protection sociale, le développement économique a permis à la population de la France et des pays industrialisés d’accéder à un niveau d’instruction et de confort matériel sans précédent dans l’histoire de l’humanité. En se combinant, d’une part, la journée de 8 heures, les 2 jours de repos hebdomadaire et les 5 semaines de congés payés, et, d’autre part, l’augmentation du nombre de retraités, d’étudiants et de chômeurs heureux ont favorisé la vie de famille et la pratique d’activités personnelles (artistiques, sportives, associatives, militantes, etc…). En formant un bloc de temps social homogène, les activités pratiquées durant le temps libre ont changé les valeurs et les modes de production. La société s’est transformée, elle a changé de temps. Les valeurs et les modes de production de l’ordre économique étant déclinants, la réussite financière, professionnelle et matérielle ne fait désormais plus sens pour une part croissante des cadres et des classes moyennes.

Même s’ils continuent à travailler et à consommer par habitude et conformisme pour éviter de se retrouver en situation de précarité et d’exclusion sociale, l’épidémie de brown-out est le symptôme qu’ils ne croient plus en la valeur du travail, de l’argent et de la consommation. Même si les industriels, les banquiers et les milieux d’affaires se considèrent encore comme la catégorie sociale dominante, puisque la réussite sur le mode « avoir » n’est plus l’étalon de la valeur d’un individu, la légitimité de l’autorité de cette soi-disant élite décline. Les valeurs et les modes de production dominants étant désormais liées au mode « être », les créatifs culturels, dont une part croissante sont membre de la classe moyenne, incarnent désormais la catégorie sociale dominante.

La quatrième phase de la dynamique des temps sociaux fait apparaître que la France et les pays industrialisés sont confrontés à un moment fragile de l’Histoire où quelque chose est en train de naître, mais qui n’est pas encore là. Ce « temps » où tout bascule est celui de « malaises temporels ». En ne reconnaissant pas le déclin de la valeur du travail et de l’argent, la prédominance croissante du mode « être » sur le mode « avoir » et le changement des attentes et des aspirations d’une part croissantes de la population, l’élite économique nie et refoule la réalité.

Ne souhaitant pas perdre ses privilèges, cette soi-disant élite, qui se dit moderniste, se comporte comme la noblesse à la fin du 18e siècle. Afin de préserver son autorité, par cupidité ou soif de pouvoir, l’élite économique déclinante impose une politique économique et sociale qui génère des tensions, des conflits et des crises de plus en plus aiguës, qui ne font que ralentir son effondrement. Sur le plan social, elle n’utilise pas la productivité horaire pour réduire le temps de travail. Étant contraints de travailler 5 jours par semaine, les cadres et la classe moyenne manquent de temps libre. Manquant de temps, de manière consciente ou inconsciente, ils souffrent de ne pas pouvoir se socialiser, structurer leurs emplois du temps, définir leurs identités, nourrir l’estime qu’ils ont d’eux-mêmes, se distinguer, s’affirmer et se réaliser autrement que par l’activité professionnelle et la consommation.

Sur le plan économique, l’élite économique a mis en œuvre la doctrine idéologique ultralibérale. En s’appropriant la valeur ajoutée et en dérégulant les prix, elle bloque les salaires, précarise les trajectoires sociales et entretient la peur du chômage. Non seulement, ces politiques économiques et sociales précarisent les conditions de vie des couches populaires et de la classe moyenne, mais en plus, elles entretiennent un climat de crise systémique qui se cristallise autour d’une croissance molle, d’un taux de chômage endémique, de la montée de l’extrême droite, du réchauffement climatique, de l’épuisement des matières premières, de la pollution de l’eau, de l’air et des sols, de la disparition de la biodiversité et de crises sanitaires récurrentes.

Jean-Christophe Giuliani

 

Cet article est extrait de l’ouvrage « Satisfaire nos besoins : un choix de société ! ». Ce livre permet d’appréhender que le choix du rapport au temps et des moyens utilisés pour satisfaire nos besoins n’est pas un choix économique, mais un choix de société dont dépend la survie et l’avenir de l’humanité.

Vous pouvez le commander au Furet du Nord, à la FNAC et dans toutes les librairies, ainsi que sur les sites du Furet du Nord, de la FNAC et d’autres librairies en ligne sous un format ePub ou Papier

Pour accéder aux pages suivantes :

– Le temps libre : un choix de société !

– Les enjeux du temps et de l’emploi du temps

– Disposer de 4 jours de temps libre : un choix de société !

– Combien d’heures devrions-nous travailler pour supprimer le chômage ?

– La réduction du temps de travail peut-elle supprimer le chômage ?

– Le déclin de l’ordre religieux au profit de l’ordre économique.

[1] Rousselet Jean, L’allergie au travail, Paris, Seuil, 1974, page 35.

[2] Ibid, page 57.

[3] Giuliani Jean-Christophe (2019), Les besoins de Maslow, Mouvement Pour un Développement Humain, [En ligne] (consulté le 12 octobre 2019), http://www.mouvementpourundeveloppementhumain.fr/les-besoins-de- maslow/

[4] Rostow Walt Whitman, Les étapes de la croissance économique, Paris, Seuil, 1960, page 25.

[5] Kazan Elia, L’arrangement, Paris, Stock, 1969.

[6] Boltanski Luc et Chiapello Eve, Le nouvel esprit du capitalisme, Paris, Gallimard, 1999, page 245.

[7] Le souffle d’Or éditions, Les créatifs culturels : émission Terre à Terre sur France culture, [En ligne] (consulté le 12 février 2018), https://www.souffledor.fr/blog/les-creatifs-culturels-emission-terre-a-terre-sur-france-culture-n582

[8] Ray Paul H, Anderson Sherry Ruth, L’émergence des créatifs culturels, enquête sur les acteurs d’un changement de société, Barret-le-Bas, Yves Michel, février 2001.

[9] Halevy-van Keymeulen Marc, L’Age de la Connaissance, Paris, MM2 Éditions, 2005, page 339.

[10] Dion Cyril et Laurent Mélanie, (2015), Demain, [DVD], France, Move Movie, France 2 cinéma, Mars films et Mely Production, Fonds de dotation Akuo Energy, OCS et France Télévisions, KissKissBankBank, 118 min.

[11] Wikipédia, Créatifs culturels, [En ligne] (consulté le 11 avril 2016), https://fr.wikipedia.org/wiki/Cr%C3%A9atifs_culturels

[12] Marchal Sylvie (2016), Le brown-out, le nouveau mal qui ronge les cadres, Cadre et dirigeant magazine, [En ligne] (consulté le 2 octobre 2017), http://www.cadre-dirigeant-magazine.com/actu/brown-out-nouveau-mal-ronge-cadres/

[13] Velluet Quentin (2016), Brown-out : que se cache-t-il derrière ce nouveau syndrome qui touche les cadres, Cadremploi, [En ligne] (consulté le 29 janvier 2018), https://www.cadremploi.fr/editorial/actualites/actu-emploi/detail/article/brown-out-que-se-cache-t-il-derriere-ce-nouveau-syndrome-qui-touche-les-cadres.html

[14] Graeber David, On the Phenomenon of Bullshit Jobs, Strike! Magazine. Retrieved August 19, 2013.

[15] Cassely Jean-Laurent, La révolte des premiers de la classe, Paris, Les éditions Arkhê, 2017, page 35.

[16] Crawford Matthew B, Eloge du carburateur, Essai sur le sens et la valeur du travail, Paris, La découverte, 2010.

[17] Edith Archambault et Viviane Tchernonog (2012), Nouveaux repères 2012 sur les associations en France, www.associations.gouv.fr, [En ligne] (consulté le 11 avril 2016), https://www.associations.gouv.fr/nouveaux-reperes-2012-sur-les-associations-en-france.html

[18] Senk Pascale, « Trop de tout ! », Psychologies magasin, n° 258, décembre 2006, page 150.

[19] L’express.fr, Travail ou vie privée ? sept salariés sur dix mènent une course contre le temps, [En ligne] (consulté le 15 avril 2018), https://www.lexpress.fr/emploi/gestion-carriere/travail-ou-vie-privee-sept-salaries-sur-dix-menent-une-course-contre-le-temps_1685435.html

[20] L’express.fr, Arrivez-vous à concilier vie professionnelle et vie privée ?, [En ligne] (consulté le 15 avril 2018), https://www.lexpress.fr/emploi/gestion-carriere/arrivez-vous-a-concilier-vie-professionnelle-et-vie-privee_1506780.html

[21] Collectif, Manifeste des chômeurs heureux, Paris, Libertalia, 2013.

[22] Carles Pierre, Coello Christophe et Goze Stéphane, (2003), Attention danger travail, [DVD], Montpellier, CP Productions, 109 min.

[23] Paoli Guillaume, Eloge de la démotivation, Paris, Lignes, 2008.

[24] Herman Edward S et Chomsky Noam, La Fabrication du consentement : De la propagande médiatique en démocratie, Marseille, Agone, 2008

[25] Les classiques des sciences sociales, Accueil, [En ligne] (consulté le 5 mars 2018), http://classiques.uqac.ca/

[26] Europe1.fr, La confiance des Français envers les médias est en forte baisse, [En ligne] (consulté le 27 février 2018), http://www.europe1.fr/emissions/le-fait-medias-du-jour/la-confiance-des-francais-envers-les-medias-est-en-forte-baisse-2968364

[27] Belot Laure (2013), Les élites débordées par le numérique, Le Monde.fr, [En ligne] (consulté le 8 novembre 2017), http://www.lemonde.fr/technologies/article/2013/12/26/les-elites-debordees-par-le-numerique_4340397_651865.html

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