Pourquoi le langage contribue-t-il à notre servitude volontaire ?

L’autorité des élites ne s’exerce pas exclusivement par l’emploi de la force, de la manipulation et des idéologies. Basil Bernstein [1] a mis en évidence que le langage contribue également à légitimer l’autorité des dominants et à entretenir les dominés dans un état de « servitude volontaire ». L’héritage familial n’est pas uniquement constitué d’un capital économique, il est aussi composé de transmissions socioculturelles dont le langage est l’un des principaux marqueurs sociaux.

  • Notre code linguistique structurerait-il notre manière d’être au monde ?

Lorsqu’un enfant apprend à parler, il intériorise inconsciemment le code linguistique et le modèle relationnel de ses parents, de son groupe de pairs et de son environnement socioculturel. La relation interpersonnelle que la mère et le père tissent avec leur enfant l’habitue à exprimer ses sentiments et ses émotions, à présenter ses idées ou ses projets et à s’adapter à la structure sociale dans laquelle il est inséré. À chaque fois que l’individu écoute ou qu’il structure son discours pour prendre la parole, il intériorise ce qui façonne son identité et les structures sociales de son groupe d’appartenance.

Le « code élaboré » et le « code restreint » se caractérisent par le degré de prévisibilité des éléments syntaxiques servant à structurer le discours. L’emploi au quotidien de l’un ou de l’autre de ces codes influence profondément le processus de socialisation et de contrôle social de l’individu et des groupes.

Le « code restreint »[2] est un mode d’organisation du discours sous une forme syntaxique simple. La construction des phrases repose sur l’emploi répétitif de conjonctions et l’usage limité d’adjectifs, d’adverbes, de propositions subordonnées et de tournures impersonnelles. Ne donnant accès ni à un vocabulaire étendu, ni à la syntaxe nécessaire à la construction d’une réflexion ou d’un discours structuré à l’oral comme à l’écrit, le code restreint limite les échanges à un contenu impersonnel, concret, descriptif et narratif. Comme il s’exprime sous une forme non verbale (ton de la voix, mimiques, gestuelles et accents expressifs), le code restreint se transmet, souvent de manière inconsciente par imitation du langage familial, professionnel et social. Ces significations impliquent l’existence de valeurs et de règles tacites consciemment partagées qui s’expriment à travers des rituels à caractère protocolaire et des entrées en conversation (voitures, football, travail, etc.).

De ce fait, en se socialisant dans un environnement qui emploie le code restreint, l’enfant risque de compromettre la stimulation de son intelligence linguistique, ses études et son autonomie. Comme elle repose davantage sur un discours concret et objectif (consignes, ordres, discours à caractère technique, etc.) que sur un discours abstrait et subjectif, la pratique quotidienne d’une activité professionnelle favorise l’imprégnation du code restreint au détriment du code élaboré. Comme les conversations entre collègues de travail reposent, pour l’essentiel, sur des thèmes répétitifs, des passe-temps (football) et des rituels (politesse), elles inhibent le questionnement sur le sens du travail, les normes et les valeurs de la société pour en changer les règles. En inhibant l’expression des intentions individuelles, l’emploi exclusif du code restreint renforce la cohésion du groupe et la dépendance de l’individu à son activité professionnelle. En effet, l’utilisation exclusive du code restreint produit un discours qui favorise l’adhésion tacite aux règles du groupe et à des revendications collectives plutôt qu’individuelles. En maintenant les salariés dans des pratiques professionnelles qui imposent l’emploi du code restreint, l’élite économique renforce la légitimité de son autorité et l’ordre social.

Le « code élaboré »[3] exige de maîtriser les règles grammaticales et d’évoluer dans un environnement familial et social qui le pratique couramment. Il correspond à un mode d’organisation des éléments du discours sous une forme grammaticale et syntaxique plus complexe qui rend plus attentif à la signification des énoncés et à l’usage du langage. L’utilisation de prépositions, de conjonctions, de propositions subordonnées et de pronoms impersonnels, ainsi que le choix rigoureux d’adjectifs et d’adverbes, permet la construction de phrases structurées et logiques. Ces phrases permettent au locuteur d’exprimer ses sentiments, ses émotions, ses idées, ses expériences, ses projets et ses intentions individuels de manière différenciée et détaillée. En procurant un maximum de ressources linguistiques et de combinaisons verbales pour nuancer l’expression de ses idées, le code élaboré permet de modifier son discours en fonction de ses interlocuteurs. Deux enfants disposent d’un même niveau de performance intellectuelle. Le premier utilise à la fois le code élaboré et le code restreint, tandis que le second uniquement le code restreint.

En stimulant l’intelligence linguistique, le code élaboré facilite la réussite universitaire, l’accès aux activités intellectuelles et aux fonctions d’encadrement du premier. Par conséquent, malgré un niveau de performance intellectuelle identique, le premier imposera naturellement son autorité au second. Aussi, l’emploi de la structure syntaxique de code élaboré est l’une des clefs, souvent inconsciente, de la subordination des classes populaires aux élites. Comme elle influence la réussite universitaire, professionnelle et sociale, la maîtrise du langage de code élaboré contribue à la reproduction sociale des élites. Comme elles pratiquent au quotidien le code restreint, les classes populaires sont inconsciemment subordonnées aux classes moyennes qui pratiquent le code élaboré, elles-mêmes subordonnées aux élites économiques et politiques.

  • Pourquoi les cadres et les classes moyennes acceptent-elles la subordination à l’ordre établi ?

La question qu’il est légitime de se poser est celle-ci : pourquoi les cadres et les classes moyennes qui disposent du même code linguistique que les élites acceptent-elles de se subordonner à l’ordre social établi ? Le contrôle social ne repose pas exclusivement sur le code linguistique. Il s’exerce également à travers les relations interpersonnelles que l’individu intériorise au contact de sa famille et de son groupe d’appartenance. Ce mode de contrôle, qui peut être d’incitation positionnelle ou personnelle, oriente, souvent de manière inconsciente, d’une part, la structuration de l’identité, la manière de percevoir la réalité et de se comporter avec les autres, et, d’autre part, les marges d’initiatives que l’individu s’accordera pour choisir ses études, sa profession et son projet de vie. Il existe deux types de famille : la famille qui exerce un contrôle sur le mode de l’incitation positionnel et celle qui exerce un contrôle sur le mode de l’incitation personnel. Le mode relationnel vécu à l’intérieur de ces deux types de famille influence de manière significative la relation que l’enfant ou l’adulte tissera avec lui-même et les autres.

La famille qui applique inconsciemment la forme de contrôle sur « le mode d’incitation positionnelle »[4] dispose du code restreint et du code élaboré. Elle se réfère à un discours structuré, rationnel, objectif et logique qui repose sur des normes, des valeurs et des coutumes établies sur des règles sociales, des textes de loi et des procédures admises par le groupe ou la société. L’autorité d’un individu et sa place dans la famille reposent sur une organisation de type hiérarchique dont la légitimité dépend de critères objectifs et quantifiables : le statut social, le capital matériel et financier, le grade, le niveau d’étude, l’âge et le sexe. L’initiative des prises de décisions et les responsabilités sont détenues par ceux qui ont le plus de capital, le statut social le plus élevé, le diplôme le plus prestigieux, etc. Son autorité repose, pour l’essentiel, sur sa fonction, son statut et l’utilité sociale que lui confère son activité professionnelle.

Les règles du groupe sont transmises à travers des formes d’expressions verbales. Par exemple, les règles relatives à l’âge peuvent se transmettre ainsi : « A ton âge, tu devrais être capable de faire ça » ou « Papa n’admet pas que tu lui parles ainsi. » La règle de la division des sexes peut être transmise à travers ce mode d’expression : « Les petits garçons ne pleurent pas », les règles propres à la sous-culture peuvent se transmettre ainsi : « les gens comme nous n’agissent pas de la sorte ». Ces règles s’imposent à l’individu sans qu’il puisse les discuter ou les refuser. La transgression de ces règles peut provoquer un sentiment de honte et le refus de s’y soumettre engendre automatiquement le rejet et l’exclusion du groupe.

En favorisant l’emploi du « nous » collectif au détriment du « je » individuel, « la famille positionnelle » renforce, d’une part, la stabilité, l’homogénéité, le sentiment d’appartenance et la cohésion du groupe au détriment de l’individu, et, d’autre part, la progression homogène du groupe vers un objectif commun. En revanche, en inhibant l’acquisition d’une forme de discours fondé sur une argumentation et une explication élaborée des choix, des valeurs, des intentions et des motivations individuelles, la famille positionnelle n’encourage pas ses membres à exprimer verbalement les particularités de leur sensibilité subjective. Celui qui agirait ainsi risquerait de mettre en évidence l’ambiguïté des normes et des valeurs sur lesquelles reposent la légitimité de son autorité et le sens de sa vie. Il serait confronté à des conflits psychologiques et à une crise identitaire profonde qui remettraient en question, d’une part, ses modes de relation, son autorité et son statut social, et, d’autre part, le mode de contrôle social de sa famille et l’ordre social en place.

Les études qui favorisent l’imprégnation du « mode positionnel » sont les études scientifiques et juridiques qui font appel à la logique, à la rigueur et à l’objectivité ainsi que les écoles de gestion, de commerce et d’ingénieurs. Ces études sont valorisées par les entreprises, car elles forment des cadres dociles et prévisibles, favorables à la Religion économique. L’élévation hiérarchique de ces étudiants est facilitée par leur subordination naturelle à l’élite économique et à l’ordre social établis. Les critères de réussite de la famille positionnelle étant la réussite financière, professionnelle et matérielle, elle est parfaitement adaptée à la Religion économique.

Les familles qui appliquent une forme de contrôle sur « le mode de l’incitation personnelle »[5] s’expriment sur un code de langage élaboré. Ce code linguistique favorise la capacité à se décentrer, une bonne connaissance de soi et une bonne qualité d’écoute. L’association du code élaboré au mode personnel offre également la capacité à considérer les autres non pas comme des objets, mais comme des sujets. La socialisation de l’enfant n’étant pas dirigiste, la famille personnelle l’encourage à exprimer librement ses besoins, ses désirs et ses émotions, ainsi qu’à expliquer les motivations de ses choix, de ses comportements et de ses actions. L’acquisition de ce mode de fonctionnement libre et autonome est transmise à travers des formes d’expressions verbales qui apprennent à l’enfant à prendre des décisions sur la base d’arguments. Par exemple, face à un enfant qui ne souhaite pas embrasser son grand-père, la mère d’une famille positionnelle emploiera cette tournure de phrase : « Les enfants embrassent leur grand-père. »

À l’inverse, celle d’une famille personnelle utilisera celle-ci : « Je sens que tu n’aimes pas embrasser ton grand-père. Mais il est malade, il t’aime beaucoup et tu lui ferais un grand plaisir. » Ces échanges lui apprennent, d’une part, à être à l’écoute de ses propres émotions et de celles des autres, et, d’autre part, à se décentrer pour développer très tôt une plus grande conscience de son individualité. De ce fait, son intégration au groupe ne dépend pas de sa capacité à s’adapter aux attentes de sa famille et de la société, mais plutôt de sa capacité à tenir sa place en respectant ses particularités individuelles.

La famille à « orientation personnelle » s’organise de façon démocratique. Les décisions importantes qui orientent la vie de l’individu et du groupe résultent d’une discussion et d’une délibération de type démocratique, à laquelle chaque membre peut contribuer en exposant ses arguments. Suite à l’étude des arguments, l’individu décidera librement et en conscience s’il est disposé, ou pas, à suivre les choix et les orientations de sa famille. Sa conduite n’étant pas dictée par une idéologie ou sa famille, celui qui ne souhaite pas suivre ces directives a le droit d’expliciter ses intentions, ses projets et les raisons de sa décision. Les responsabilités n’étant pas distribuées en fonction d’un statut formel, les membres de la famille peuvent choisir une mission en fonction de leurs affinités, aspirations, aptitudes, capacités d’initiatives, motivations et objectifs individuels. Même s’il ne fait pas l’objet d’un contrat, le non-respect d’un engagement envers la famille peut provoquer un sentiment de culpabilité.

En valorisant l’identité d’un individu pour ce qu’il « est », la famille personnelle remet en cause l’identité de celui qui est adulé pour ce qu’il « a ». L’autorité d’un individu repose davantage sur ses compétences et ses qualités humaines et relationnelles que sur son statut social et hiérarchique, son âge, ses diplômes et son pouvoir économique. De ce fait, celui qui évolue dans « une famille à orientation personnelle » aura beaucoup de difficulté à accepter l’autorité d’un supérieur dont il ne reconnaît pas la légitimité.

La personnalité et l’identité de l’individu évoluent en permanence en fonction de ses expériences, de ses échanges et de ses rencontres. S’il ne prend pas conscience des composants identitaires de sa nature intérieure, l’absence de repères formels stricts peut provoquer des angoisses et des tensions psychologiques. N’étant pas figé par un rôle social, le passage d’un « mode positionnel » à un « mode personnel » transforme, perturbe et déséquilibre profondément l’identité, la personnalité, le comportement et le mode relationnel de l’individu. En conférant davantage d’importance aux relations subjectives et intimes qu’aux relations objectives et professionnelles, il contribue à un renversement des valeurs. La généralisation de ce renversement menace directement l’ordre social et l’autorité des élites économiques.

Les études favorables à l’imprégnation du mode personnel sont, d’une part, les études de lettre, indispensables à la maîtrise du langage de code élaboré, et, d’autre part, les études en sciences humaines nécessaires à l’acquisition des connaissances et des concepts théoriques requis pour questionner le sens de ses actes et de la vie. Produisant des cadres imprévisibles et insoumis aux structures hiérarchiques, ces études ne sont pas valorisées par les entreprises. Pour finir, comme elles remettent en question les critères de réussite de la Religion économique, la famille à orientation personnelle menace directement l’ordre social et l’autorité de l’élite économique.

  • Comment préserver l’ordre social en place ?

La légitimité de l’autorité des élites repose sur les membres de la classe moyenne de type positionnelle qui respectent l’autorité de celui qui détient les attributs du pouvoir que sont l’argent, le statut social et les diplômes. Une révolution se produira lorsque la majorité des classes moyennes des pays industrialisés délaissera la forme positionnelle pour la forme personnelle.

En basculant d’un système de valeur fondé sur l’Avoir à un système fondé sur l’Être, l’individu remet en question la légitimité de l’élite économique et de l’ordre social en place. Ce basculement peut intervenir très simplement dans la tournure de phrase qu’il utilise inconsciemment pour se présenter aux autres. La tournure qu’il utilise naturellement influence l’image qu’il a de lui, son identité et sa manière d’être au monde. En effet, lorsqu’un consultant se présente ainsi, « Bonjour, je m’appelle Paul et je suis consultant », il fusionne son identité personnelle avec son métier. Comme il confond « avoir » un emploi avec « être » un métier, il trahit son aliénation inconsciente à son activité professionnelle.

Comme il est profondément dépendant de son statut professionnel pour être, construire l’estime qu’il a de lui et exister socialement, la perte de son emploi s’apparente à la perte de son identité et de ce qui le valorise socialement. Afin de sortir de cette confusion, il est indispensable qu’il apprenne à se présenter de manière correcte et logique : « Bonjour, je m’appelle Paul et le métier qui me procure un revenu est celui de consultant ». En se présentant logiquement, l’individu distingue son identité personnelle du moyen qu’il utilise pour obtenir un revenu. Ainsi, il est moins dépendant de son activité professionnelle pour exister socialement. Cet acte anodin, qui consiste à distinguer son identité de son métier, contribue à remettre en question la légitimité de l’autorité de l’élite économique.

Afin de préserver la légitimité de son autorité, l’élite économique entretient les enfants, les jeunes et les adultes dans un climat social favorable à la reproduction des familles à orientation positionnelle. Les principaux vecteurs de cette reproduction sont l’éducation et l’activité professionnelle. Le rôle de l’éducation est, d’une part, de favoriser l’appropriation du code élaboré sur un mode de contrôle positionnel, et, d’autre part, de préparer les jeunes à adhérer aux normes, valeurs et critères de réussite de l’idéologie dominante : se socialiser et se réaliser par l’intermédiaire de l’activité professionnelle et de la consommation. Le système éducatif habitue les jeunes à rentrer en compétition pour obtenir des gratifications (meilleures notes, première place et diplômes prestigieux) et éviter des punitions. Ainsi, ils apprennent, dès le plus jeune âge, à rentrer en compétition les uns avec les autres pour gravir l’échelle hiérarchique.

En recrutant des étudiants qui ont préparé une école de commerce, de gestion ou d’ingénieur et, à la rigueur, des études de physiques, de mathématiques ou de droit, les entreprises favorisent ceux qui pratiquent l’orientation positionnelle. Ces formations forment des cadres obéissants et prévisibles capables de servir les intérêts des entreprises sans trop se poser de question sur les finalités et les conséquences de leur investissement professionnel. À l’inverse, les entreprises offrent peu de débouchés à ceux qui ont suivi des études en lettre, en philosophie ou en sciences humaines. En s’accompagnant d’une augmentation considérable des frais d’inscriptions (10 000 $ par an), la privatisation des universités motive les étudiants américains à favoriser les études directement opérationnelles d’un point de vue professionnel au détriment des études en sciences humaines.

Non seulement les études en sciences humaines ne conduisent pas forcément à un emploi valorisant et gratifiant, mais surtout, la rémunération d’un professeur de philosophie n’est pas suffisante pour rembourser le crédit que l’étudiant doit souscrire pour financer ses études. Étant par nature hiérarchique, l’activité professionnelle contribue à structurer le mode relationnel de l’individu sur un mode positionnel. Comme la majorité des emplois nécessite l’utilisation du code restreint et exige le respect de la hiérarchie, la pratique quotidienne d’une activité professionnelle habitue le salarié à utiliser un code de langage restreint et à intérioriser le mode d’orientation positionnelle. C’est ainsi que l’éducation et l’entreprise habituent l’enfant et le salarié à croire en la Religion économique et à accepter docilement la légitimité de l’autorité de l’élite économique.

Après avoir dévoilé les moyens de maintenir les cadres et les classes moyennes dans un état de servitude volontaire, nous présenterons dans la troisième partie les stratégies mises en œuvre par le management et le marketing pour les inciter à travailler et à consommer toujours plus.

Pour accéder aux pages suivantes :

– Le travail et la consommation : les piliers de l’ordre social.


[1] Bernstein Basil, Langage et classe sociales : codes socio-linguistiques et contrôle social, Paris, Les éditions de Minuit, 1975

[2] Idid.., page 130.

[3] Idid.., page 133

[4] Ibid, page 209.

[5] Ibid, page 210.

Une réflexion sur « Pourquoi le langage contribue-t-il à notre servitude volontaire ? »

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